Commentaire Biblique de Jean Calvin
Nombres 11:10
10. Puis Moïse entendit le peuple pleurer. Merveilleuse en effet, et presque prodigieuse était la folie du peuple, donc tous pleuraient comme réduits à l'extrême du désespoir. Qu'auraient-ils fait en cas de famine? Et s'ils devaient ronger des racines amères, presque sans jus? Et s'ils avaient dû vivre de pain insipide et malsain? Nous voyons donc comment, par l'indulgence de leurs désirs dépravés, les hommes se rendent misérables au milieu même de la prospérité. Apprenons donc à brider nos passions excessives, afin de ne pas nous apporter des ennuis et des inconvénients, et toutes sortes de sentiments douloureux; car si la cause est dûment pesée, quand les hommes s'affligent de tristesse et de lamentations, nous trouverons généralement que, tandis que le mal peut être allégé par l'endurance, sa douleur est augmentée par des imaginations absurdes. Mais ici un exemple grossier de luxe nous est présenté, quand, dans leur satiété, ils pleurent comme si une longue abstinence les menaçait de mort. Ce fut un effet de zèle saint et louable, que cette grande perversité déplaise à Moïse; mais il n'était pas sans erreur en le portant à l'excès; car il discute injustement avec Dieu, se plaignant qu'il lui avait imposé un fardeau trop lourd, alors que tie savait tout le temps qu'il était soutenu par sa puissance. Sa charge était en effet difficile et laborieuse; mais en ce qu'il avait expérimenté l'aide merveilleuse de Dieu, chaque fois qu'il gémissait sous son fardeau, il n'y avait pas lieu de se plaindre; d'ailleurs, puisqu'il avait été honoré d'un honneur particulier, il était ingrat de marquer de disgrâce le bon don de Dieu. Il considère comme son plus grand mal que la charge de gouverner le peuple lui ait été confiée; tandis que tous ses sens auraient plutôt dû être ravis d'étonnement, que Dieu avait daigné le choisir pour être le rédempteur de son peuple et le ministre de sa merveilleuse puissance. Cela aussi était très inconsidéré, demander s'il avait engendré ou engendré le peuple; comme si sa vocation de Dieu ne le mettait pas suffisamment en obligation, ou comme s'il n'y avait pas d'autres liens que ceux de la nature. Dieu, en effet, a inspiré aux parents un tel amour envers leur progéniture, qu'ils subissent volontiers d'incroyables troubles à cause de eux; mais Moïse était lié par une autre sorte de piété, car par l’ordre de Dieu, il était le père du peuple. C'est pourquoi il n'aurait pas dû considérer seulement la nature, mais aussi l'obligation de sa charge.